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La physique, c’est une façon de vivre !

Publié par Pauline Adeline, le 9 avril 2025   79

Doctorant en physique nucléaire, Alexandre Brizard a entamé, en 2024, sa troisième et dernière année de thèse. Il travaille dans son laboratoire à Caen avec le S3-LEB (Super Separator Spectrometer-Low Energy Branch), une installation de faisceau d'ions radioactifs à basse énergie dédiée à l'étude des noyaux exotiques, un montage bien utile à ses expériences.


Cet article appartient à la collection "Portraits croisés" : 
des parcours de jeunes chercheur·se·s vus par d'autres jeunes chercheur·se·s.


LES MAINS DANS LE CAMBOUIS

La physique, Alexandre y pense depuis longtemps, depuis le collège même, quand il se passionnait déjà pour les différents types de particules. « Au collège, j’ai lu toutes les pages Wikipédia de physique des particules, d’astrophysique », confie-t-il. Évidemment, son intérêt pour la discipline s’est précisé au fil des ans. Après un baccalauréat scientifique, il fait une classe préparatoire à l’issue de laquelle il intègre l’École Nationale Supérieure d’Ingénieurs de Caen (ENSICAEN). Il lui aura (presque) suffit de traverser la rue pour s’inscrire en doctorat, son laboratoire le Grand Accélérateur National d’Ions Lourds (GANIL) se situant effectivement en face de l’école. Depuis, ses recherches le mènent jusqu’à Darmstadt, où il vit actuellement, dans le laboratoire allemand Gesellschaft für Schwerionenforschung (GSI, Société pour la recherche sur les ions lourds, en français), où il réalise une mission longue durée permettant aux deux laboratoires, français et allemand, de coopérer sur des expérimentations voisines.

À l’échelle du laboratoire comme à l’échelle européenne, les chercheurs en science (et dans le cas présent en physique nucléaire) travaillent en équipe. L’échange et le dialogue sont cruciaux pour faire avancer la recherche, tant sur le plan théorique que sur le plan expérimental. Ces deux faces de l’activité de recherche restent d’ailleurs indissociables. La physique expérimentale, pratiquée par Alexandre, « avec les mains dans le cambouis tous les jours », présente l’avantage d’offrir un spectre d’activités très diversifiées : travailler sur l’installation expérimentale, faire des expérimentations sur un logiciel informatique, s’occuper du réseau local sur lequel sont effectués le transfert des données des expériences, rechercher des expériences à effectuer, analyser les données des expériences.

IL Y A DES ENJEUX SOCIÉTAUX CONCERNANT CERTAINS VOLETS DE LA  PHYSIQUE NUCLÉAIRE

Évidemment, les thématiques nucléaires cristallisent bon nombre de crispations et interrogations. Que nous est-il donné à comprendre de ce champ de recherche, en dehors des enjeux écologiques que représentent les centrales nucléaires ? Sur cette question, Alexandre nous met en garde, la physique nucléaire et les recherches menées dans ce domaine ne sont pas forcément en lien avec lesdites centrales, ni même avec la bombe atomique, bien connue de l’opinion publique, même s’il reconnaît qu’il « y a de vrais problèmes en termes d’industries énergétiques nucléaires ». Alexandre précise que ces « enjeux sociétaux concernent certains volets de la physique nucléaire mais que la communication scientifique, parfois catastrophiste, ne permet pas aux gens d’être correctement informés ».

SPECTROSCOPIE LASER DES ÉLÉMENTS SUPER LOURDS

Le sujet d’Alexandre reste nonobstant assez éloigné de ces grandes questions du débat public. Il se concentre sur  la spectroscopie laser des éléments super lourds. Ces éléments, des atomes un peu inhabituels, sont produits à l’aide d’un accélérateur de particules et se désintègrent très rapidement. Ils présentent parfois des propriétés que les théoriciens peinent à prévoir tant les modèles (descriptions en langage mathématique) pour les expliquer sont complexes. À GSI comme au GANIL, l’objectif des expériences est de mesurer, à l’aide de lasers, les différentes énergies que peuvent avoir les électrons autour du noyau de l’atome. Cette mesure permet d’accéder à des informations concernant le noyau, comme sa taille ou sa forme.

À la question : Mais à quoi ça sert ?, Alexandre met le doigt sur un aspect de la recherche : n’a-t-on pas fait les plus grandes découvertes sans en connaître leurs potentialités, leurs usages ultérieurs ? On cherche, mais on ne sait pas forcément pourquoi ! C’est même le propre de la recherche fondamentale de ne pas a priori savoir « ce qui va être développé à partir de nos résultats de recherche dans le futur ».

Toujours est-il que pour Alexandre, « découvrir de nouvelles manières de calculer les choses change la manière de voir ce qui nous entoure.  C’est une façon de vivre, finalement, la physique ! » Il s’imagine d’ailleurs, après sa thèse, continuer dans la recherche, en effectuant par exemple un post-doctorat et en restant alerte vis-à-vis des opportunités qui pourront se présenter à lui. Alexandre reviendra en France en mars 2025, dans la dernière ligne droite de sa thèse, pour se concentrer sur sa rédaction. Nous lui souhaitons une bonne continuation et de la chance dans ses recherches !

Crédit photo : Alexandre  Brizard (DR).


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