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Loïcia, gymnaste et doctorante à la fois.

Publié par Marie Duverger, le 22 avril 2025   410

Depuis toute petite, Loïcia Porte a toujours eu l’ambition de mener de front son cursus scolaire et la pratique de la gymnastique à haut niveau. Depuis deux ans maintenant, elle s’est lancée dans la réalisation d’une thèse mêlant sport et physiologie, un sujet qui lui permet d’être à 100% dans la gymnastique entre ses recherches et sa pratique sportive.


Cet article appartient à la collection "Portraits croisés" : 
des parcours de jeunes chercheur·se·s vus par d'autres jeunes chercheur·se·s.


En débutant la gymnastique à 6 ans, Loïcia n’imaginait pas que celle-ci prendrait autant de place dans sa vie. Dès l’instant où elle a intégré le groupe compétition dans son club La Saint-Loise Gymnastique, elle a dû apprendre à gérer ce rythme de vie entre entraînements et école, avec une intensification sur les deux tableaux au fil des années.

Cela lui a plutôt bien réussi puisqu’aujourd’hui, après un bac scientifique (aménagement de l’année de Terminale sur deux ans), une licence STAPS à Caen mention “Entraînement sportif” (en 4 ans au lieu de 3 en cursus classique) et un master réalisé à Rouen “Optimisation de la performance sportive” en poche, Loïcia n’est plus qu’à un an d’obtenir un doctorat !

DES BARRES ASYMÉTRIQUES À LA RECHERCHE : UNE THÈSE PAS COMME LES AUTRES : 

La poursuite de ses études en thèse n’était pas une évidence pour Loïcia mais après avoir travaillé sur l’intégration cognitive pour atteindre la performance par l’entraînement neurobiofeedback appliquée à la gymnastique lors de son mémoire de seconde année de master, son directeur de mémoire Pierpaolo Lodice du CETAPS Rouen lui a proposé de continuer sur ce sujet grâce à la réalisation d’une thèse.


LE SAVIEZ-VOUS ?
Neurobiofeedback signifie auto-régulation physiologique du sujet suite à la lecture des résultats de son activité physiologique instantanée.


Malgré la perspective d’un emploi du temps encore bien chargé (il faut tout même compter 25 à 30 heures d’entraînement par semaine à un niveau national élite !), c’était là un nouveau challenge que la gymnaste, spécialiste des barres asymétriques, n’a pas longtemps hésité à relever : “réaliser cette thèse m’a permis de commencer ma vie professionnelle tout en restant sportive de haut niveau. Je peux organiser mon emploi du temps librement puisqu’il n’y a pas d’horaires précises en thèse, et je peux également rester dans mon club d’origine grâce au contrat CIFRE [Convention Industrielle de Formation par la REcherche, le doctorant est employé par une entreprise et encadré par un laboratoire public de recherche, ndlr] qui leur a permis de m’embaucher”.

C’est ainsi que Loïcia commence sa thèse CIFRE en 2022 entre son club de gymnastique, qui l’emploie en tant qu’entraîneuse, et le Centre d'études des transformations des activités physiques et sportives (CETAPS), son laboratoire de rattachement.

L’ENTRAÎNEMENT NEUROBIOFEEDBACK

À travers l’entraînement neurobiofeedback au nom d’apparence compliqué se cache un objectif concret : créer des modèles génératifs pour les sportifs et leur permettre de moduler “à volonté” leurs capacités physiologiques (type fréquence cardiaque, température, conductance au niveau des doigts de la main) selon les conditions de leur environnement. Ces paramètres sont souvent “déréglés” par les facteurs de stress compétitif et cela permettrait d’améliorer les performances des athlètes lors de la compétition.

Pour cela, Loïcia a notamment réalisé une étude pendant 6 mois sur de jeunes gymnastes âgées de 8 à 12 ans en les confrontant, au milieu de leur entraînement, à des tests face à un ordinateur. Pour ces sujets d’étude, le but est, par exemple, de réussir à moduler leur fréquence cardiaque en toute conscience selon les consignes données. Le protocole de cette étude est innovant puisqu’aucune étude n’a encore été faite avec une durée de suivi aussi longue et sur des sujets aussi jeunes.

En effet, les sujets d’études ciblés classiquement ont entre 15 et 25 ans, ce qui correspond à la période théorique de performance maximale d’une gymnaste mais viser ces âges paraissait moins cohérent pour Loïcia qui nous explique à juste titre que “de 8 à 12 ans les capacités d’apprentissage sont bien plus élevées, et l’intérêt est de préparer l’athlète avant cette période dite de performance maximale”.

La doctorante traite en ce moment les données afin de déterminer si l’application de ce protocole de préparation mentale basée sur la physiologie de l’athlète a un impact significatif (positif ou négatif) sur les gymnastes, en comparant les tests initiaux et finaux d’un groupe test, gymnastes qui vont suivre le protocole proposé par Loïcia, et d’un groupe contrôle, gymnastes qui ne suivront aucun protocole.


ET L’AGENDA ?
Une doctorante qui jongle entre travail pour la thèse et entraînements pour préparer les championnats de France Élite ? Ça donne un agenda bien rempli avec du sport tous les lundis, mardis, jeudis et vendredis de 15h à 20h, et tous les mercredis et samedis toute la journée. Et le reste du temps… eh bien c’est le travail de thèse qui comble les “trous” ! “De temps en temps je cale des moments de repos, mais globalement, mes semaines ne contiennent pas de week-end, c’est 7j/7”.


UN PROJET PRO SANS SPORT ? IMPOSSIBLE !

Même si l’avenir est encore un peu flou, Loïcia compte bien poursuivre ses desseins. D’une part, la carrière d’une gymnaste étant assez courte, elle continuera son parcours sportif à haut niveau “tant que la progression est présente” car dans ce cas “il n’y a pas de raison d’arrêter”.

D’autre part, sa recherche mérite d’être poursuivie et ce serait une belle opportunité pour elle que de pouvoir poursuivre ses travaux après la thèse, tout en continuant à baigner dans le monde de la gymnastique. Les idées fourmillent déjà chez notre gymnaste : amélioration du protocole, accompagnement des athlètes sur le terrain, développement de la méthode avec les capteurs pour être mobile lors des tests, discussions pour convaincre les entraîneurs de l’utilité de cet entraînement pour ensuite une application de ce dernier à plus grande échelle… le tout finalement dans un but ultime : “c’est toujours intéressant de lier entraîneur et scientifique pour améliorer les performances, surtout à un niveau international pour que les Français.es ramènent des médailles olympiques !”.

Crédit photo : Loïcia Porte (DR).


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